Viennent d’être réédités conjointement aux Éditions du Pacifique, dans la collection Les Lointains, deux grands classiques de la littérature française en lien avec la Malaisie : le livre Malaisie d’Henri Fauconnier et le roman Le Sacrilège Malais de Pierre Boulle. Pour l’occasion, une soirée de lancement s’est déroulée en toute convivialité le 16 novembre dernier dans les locaux de la Galerie du Pacifique, à Paris. Étaient présents Roland Fauconnier, fils d’Henri et auteur de la remarquable biographie Henri Fauconnier, Conquêtes et Renoncements (Le Pacifique, 2014), Jean Loriot-Boulle, président de l’Association des amis de l’œuvre de Pierre Boulle, et Aurélia de Villepin-de Vathaire, auteure d’une thèse sur « les écrivains-planteurs français de caoutchouc en Malaisie, 1905-1957 ».
Cette heureuse et double réédition vient ponctuer une période faste pour deux auteurs qui, s’ils nous ont tous deux quittés depuis un certain temps déjà, continuent de vivre à nos côtés à travers leurs écrits – et leur esprit – visionnaires. Pour Pierre Boulle, la sortie récente d’un nouvel épisode hollywoodien de La Planète des Singes – le neuvième depuis 1968 – continue de prolonger la mémoire d’un auteur dont le nom, paradoxalement, n’évoquera presque rien à la plupart des jeunes fans d’aujourd’hui. Son roman Le Sacrilège Malais, paru en 1951 et le deuxième après William Conrad, est une peinture féroce et critique de la bureaucratisation et de la taylorisation à outrance du monde des plantations de Malaisie. Cet ouvrage lui valut un succès d’estime immédiat, suivi l’année d’après par l’immense succès critique et commercial de son troisième roman, Le Pont de la Rivière Kwai. S’ensuivra une œuvre riche et intense, dans laquelle réapparaîtra épisodiquement la Malaisie, terre de ses premières aventures extrême-orientales. Concernant Le Sacrilège Malais, il fallait remonter à 1996 pour trouver trace d’une réédition, en l’occurrence chez Omnibus dans un recueil intitulé « Romans héroïques ».
Pour Henri Fauconnier, son livre Malaisie aura marqué l’apex d’une carrière littéraire aussi brève que couronnée de succès. Le Prix Goncourt lui sera remis en 1930 pour cette peinture poétique et vraie d’une Malaisie qui l’aura accueilli pendant ses années de planteur et qui restera à jamais pour lui une sorte de « terre promise ». La dernière édition, déjà aux Éditions du Pacifique, datait de 2003, et cette nouvelle mouture en reprend, si ce n’est le format, au moins le contenu, avec notamment les treize gravures originales de Charles Fauconnier, jeune frère de l’auteur. On y retrouve aussi, parmi les riches annexes, l’ébauche de traductions de pantouns, genre poétique malais qu’affectionnait particulièrement Henri. Cette réédition de Malaisie fait suite à la parution en 2014 de la biographie Conquêtes et Renoncements signée par Roland Fauconnier, de celle en 2015 d’une édition malaise (dans une traduction de Muhammad Haji Salleh), ainsi qu’au changement de nom, en 2016, du Lycée francais de Kuala Lumpur. Ce dernier a en effet été rebaptisé Lycée Henri Fauconnier pour rendre hommage à l’œuvre d’un homme qui aura contribuée, plus que nulle autre sans doute, à rapprocher la France et la Malaisie. La mémoire de l’écrivain-planteur devrait se perpétuer encore dans les années qui viennent. Rien que cette année, a été célébré par les autorités malaises le centenaire de la première plantation industrielle en Malaisie du palmier à huile, réalisée par Fauconnier à Tennamaram (sur la Selangor) – un estate qui lui appartenait alors –, et viennent d’être initiés les projets d’une fondation à son nom par son arrière-petit-fils Jérémie Fontaine, et d’un prix d’écriture au bénéfice des écoliers et étudiants en langue française de Malaisie.
Quelques photos de la rencontre du 16 novembre dernier, à Paris (photos © Dominique Fauconnier) :
Henri Fauconnier, Malaisie, et Pierre Boulle, Le Sacrilège Malais, Collection Les Lointains, Éditions du Pacifique, octobre 2017 (20 Euros et 21,50 Euros respectivement).