Les Pierreries de Pantun Sayang

C’est ici, sur Lettres de Malaisie, que l’aventure du pantoun en français a trouvé refuge il y a maintenant un peu plus de deux ans. Depuis, le petit pantoun francophone n’a cessé de grandir et de s’ouvrir au monde ! Pour marquer la création de Pantun Sayang, l’Association Française du Pantoun, et la parution de la toute première collection de pantouns francophones, Une Poignée de Pierreries (Jentayu, octobre 2014), nous reprenons aujourd’hui partiellement l’entretien de Georges Voisset, président de l’association, paru le 23 octobre sur le site de l’édition malaisienne du PetitJournal.com

LPJ : La création de votre association et du site démontrent un véritable intérêt pour cette forme poétique. Si vous deviez résumer cela en quelques chiffres, lesquels seraient-ils ? D’autre part, combien de personnes ont participé aux différents concours organisés par la Revue Pantouns avant la création du site ?

Georges VoissetGeorges Voisset : Je suis ravi que vous parliez immédiatement chiffres ! La poésie n’est pas spécialement fameuse pour cela, mais en l’occurrence, ils sont éloquents. Le nombre de poètes français s’étant essayés au pantoun avant 2012 , c’est-à-dire avant le début de notre aventure et le lancement de la Revue Pantouns, était de… quatre. Il en existe certainement quelques autres, que l’Histoire n’a pas spécialement retenus, mais peu importe : espacés sur plus de deux siècles, ces noms, aussi important que soit le principal, René Ghil, sont des « météorites ». Il y eut aussi Henri Fauconnier, le célèbre auteur de Malaisie, qui a promu le pantoun dans son roman mais qui à ma connaissance n’a pas pantouné lui-même. Deux ans et 12 numéros de notre revue plus tard, c’est désormais fort d’une cinquantaine de poètes et poétesses que sont inaugurés, en ce mois de septembre 2014, Pantun Sayang, l’Association Française du Pantoun, et son site dédié. Le vrai pantoun n’est plus, désormais, celui que l’on croyait, en Francophonie et ailleurs…

45 de ces poètes et poétesses sont présents dans l’anthologie papier que nous publions en association avec les Éditions Jentayu. Ils viennent de tous les horizons de l’écriture : animateurs de blogs de poésie ou de littérature, membres de la Société des Poètes Français, de la Société des Écrivains du Québec, de la Société des Poètes Roumains, du Congrès Mondial des Poètes, simples amis de la plume que la découverte du pantoun a attirés, parfois enthousiasmés. C’est dire si nous sommes heureux que notre aventure connaisse aujourd’hui un tel succès. Notre ambition est d’abord francophone, et nous avons des contributeurs de toutes les provinces de France, en Belgique, au Luxembourg, en Espagne, en Roumanie, au Bénin, au Togo, au Canada. Mais au-delà, si notre association est française, son objectif, lui, le pantoun malais et la création poétique, n’a pas de frontières pour nous : États-Unis, Australie, Danemark ont ainsi déjà trouvé place chez nous, en attendant d’autres langues et pays. Et en Malaisie, bien entendu, où nous espérons bien susciter des espaces de création et, plus généralement, obtenir des supports de nos projets qui sont divers et nombreux. Je mentionnais le nom d’Henri Fauconnier, comment ne pas penser à une pépinière comme le lycée français de Kuala Lumpur, par exemple ?

À cet égard, et pour en venir à votre interrogation sur les concours que nous avons lancés, celui qu’a proposé Aurore Pérez au Malaysia-France Institute (MFI) et dont les meilleures productions se trouvent dans le numéro 11 de Pantouns est un excellent exemple des échanges que nous souhaitons encourager avec la Malaisie, Singapour, l’Indonésie… Un autre concours lancé l’a été sur le thème du batik, qui a produit de très beaux textes. Il y a tant à faire autour de ce genre si riche et méconnu ! Nous essayons aussi de satisfaire nos contributeurs, en proposant des thèmes qu’ils nous suggèrent. Enfin, à travers concours et thèmes, nous avons pour objectif de mettre en valeur toutes les potentialités du pantoun. Nous avons ainsi initié des échanges poétiques (pantouns échangés, à 2, 3 voix,…), le pantoun étant, par essence, un genre de dialogue, de joute poétique. C’est pourquoi ceux qui nous rejoignent ne risqueront pas de se retrouver seuls face à leur écran !

Pourquoi selon vous cet engouement pour le pantoun ? 

Pantun Sayang - AFPLa découverte du vrai pantoun, c’est-à-dire un simple petit quatrain, a conduit nos contributeurs, peu à peu, à des révélations sur les beautés du genre. On aime le nouveau, être surpris, entrer dans des mondes enchantés mystérieux, ceux d’Alice, de Narnia ou du Pantoun. Par ailleurs, il faut tenir compte de ce que j’ai dit plus haut : avant Pantouns, tout le monde ou presque en France et en-dehors du monde malais croyait – croit encore trop ! – que le pantoun est le… pantouM. Or, justement, la grande révélation de nos lecteurs a été celle-ci : le pantoun n’est donc pas ce fameux pantouM, et l’on cite ensuite Victor Hugo, Baudelaire… Notre premier obstacle a été un obstacle formidable : le pantouM selon Victor Hugo, qui fait aujourd’hui le tour du monde du Net. Fallait-il la foi pour aller contre cela !

Pour ceux qui franchirent notre petite « porte des étoiles » du vrai pantoun quatrain, la surprise que le pantoun n’est pas le pantouM a donc été très vite suivie de celle qu’il est une chose vibrante, multiple, amusante, stimulante, résistante, et donc d’autant plus féconde. Et ce n’était pas non plus le très célèbre haïku, ou le tanka, ces genres japonais qui nous ont amenés beaucoup de contributeurs curieux, justement, de découvrir d’autres mondes. Au hasard de la découverte de notre revue, suivit, comme vous le dites, un certain « engouement ».

La raison de notre succès est donc pour nous une source de très grande joie et de grand optimisme, parce que nous savons qu’une fois l’existence du vrai pantoun malais suffisamment connue du grand public, sur les réseaux, sur le Net, grâce à nos activités, projets, publications, les ressources de ce genre de poésie nous assureront un avenir bien rempli ! Car, en réalité, ce que nous recherchons c’est un élargissement de la créativité et des connaissances autour de ce genre malais, tremplin magnifique et méconnu de la Poésie universelle.

Pouvez-vous nous dire quelques mots sur votre recueil qui vient de paraître, Une Poignée de Pierreries ?

Une Poignée de PierreriesIl s’agit d’une anthologie publiée aux Éditions Jentayu en collaboration avec Pantun Sayang. Le titre est un hommage à ce grand homme qui aura donc fait tant de tort, en France, puis en Francophonie, puis dans le monde, au pantoun (à moins que ce ne soit exactement le contraire ?) : Victor Hugo en personne, pour qui la découverte du pantoun était comme celle « d’une poignée de pierres précieuses arrachées à la grande mine de l’Orient ». Ce recueil marque, avec la création de notre site, une première étape de notre succès, avec quelque 45 contributeurs francophones issus de quatre continents différents. Il regroupe environ trois cents pantouns, de tous les pays cités plus haut, certains traduits en malais et en anglais, mais aussi en chinois et en tamoul, le tout saupoudrés de strophes de grands poètes malaisiens, indonésiens et français (Victor Hugo, Henri Fauconnier, René Ghil, F.R. Daillie, etc.) et de superbes illustrations de peintres malaisiens.

Permettez-moi d’insister encore sur un point : ce recueil n’est pas une anthologie de plus, parmi des milliers d’anthologies de poèmes alignées sur des rayonnages et devant lesquelles on circule. C’est une première mondiale ! Enfin, je n’en mettrai pas ma main au feu, mais je suis convaincu qu’avant ces Pierreries, aucun recueil de pantouns non malais n’avait été publié ! La France devait bien ça au pantoun malais…

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